La médecine régénérative et la réglementation : quel rapport y a-t-il avec les BPF?
BPF (GMP pour Good Manufacturing Practices en anglais) signifie Bonnes Pratiques de Fabrication. Les BPF sont un outil d’assurance qualité qui est utilisé dans toute une gamme d’industries, y compris les industries pharmaceutiques et alimentaires. Les BPF ont pour objectifs de garantir que les produits sont fabriqués de façon conforme et contrôlés suivant les dernières normes de qualité adaptées à l’usage qui doit en être fait. Les principes de BPF contribuent ainsi à fournir aux consommateurs et aux patients des produits de qualité constante et de haut niveau de sécurité. Mais quel rapport y a-t-il avec la médecine régénérative? Eh bien, un rapport étroit si vous voulez développer une nouvelle thérapie prometteuse, du laboratoire jusqu’à la clinique. Mais, la médecine régénérative relève-t-elle du droit pharmaceutique?
La réponse est oui. En décembre 2008, la Commission Européenne a imposé le ‘Réglement sur les Médicaments de Thérapie Innovante (MTI, ATMP)’ comme ordonnance prédominante. La réglementation MTI classe les produits de thérapie génique, de thérapie cellulaire et de génie tissulaire y compris ceux à base de cellules souches, comme produits pharmaceutiques lorsqu’ils ne sont pas destinés à la recherche mais à l’homme.
Les directives de Bonnes Pratiques de Fabrication établissent des normes de qualité pour la fabrication de médicaments. Elles veillent à ce que les produits pharmaceutiques tels que comprimés et vaccins soient d’une efficacité, d’une pureté et d’une qualité constantes. Les directives BPF traitent des mesures d’assurance qualité pour tous les aspects du processus de fabrication – depuis les bâtiments, les équipements et la formation du personnel, jusqu’aux modes opératoires, au conditionnement et au stockage - ainsi que des systèmes de contrôle qualité et de documentation. Par exemple, certains chapitres des BPF traitent des exigences en matière de ventilation d’une salle blanche, tandis que d’autres ciblent tous les matériaux et réactifs utilisés pour fabriquer un médicament particulier. Elles précisent également jusqu’où un fabricant doit pouvoir retracer l’origine de chaque composant du produit fini et, bien sûr, comment effectuer le l’analyse finale du produit avant toute commercialisation.
Les directives BPF sont bien ce qu’elles sont : des directives et non des lois. La majorité des pays ont adopté des lois, obligeant les compagnies pharmaceutiques à suivre les directives BPF établies. Pour l’Europe, les directives BPF de l’UE sont accessibles au public. Il est important d’insister sur le fait que les normes BPF font partie d’un certain nombre d’autres mesures visant à protéger la santé des patients et des consommateurs, c’est-à-dire nous!
Cependant, de nouvelles innovations scientifiques et techniques comme les traitements à base de cellules souches constituent de nouveaux défis pour les autorités régulatrices, car les normes BPF doivent être adaptées en permanence voire même nouvellement élaborées pour se conformer aux progrès dans le domaine, aux caractéristiques et au profil de risques de ces produits de recherche innovants.
Les directives et réglementations BPF actuelles reposent sur des principes de qualité qui ont été établis pour les industries pharmaceutiques et de produits de santé depuis plus de 50 ans. L’émergence des concepts de médecine régénérative soulève à présent de nouvelles questions sur la façon de satisfaire les normes de sécurité et de qualité appropriées. Ceci est particulièrement difficile, car la fabrication de produits de médecine régénérative fait intervenir de nouvelles techniques de biotechnologie comme le génie tissulaire, la manipulation génétique ou des techniques de culture sophistiquées. Plus important encore est le fait qu’un produit constitué de cellules vivantes ou d’autres composés biologiques fragiles ne peut être normalisé de la même façon qu’un comprimé classique.
A titre d’exemple, des chercheurs étudient la possibilité d’utiliser des cellules souches mésenchymateuses (CSM) pour traiter certaines maladies graves, comme la maladie du greffon contre l’hôte (GVH). Les CSM peuvent être obtenues à partir de la moelle osseuse d’un donneur apparenté ou non (allogénique) ou du patient lui-même (autologue) et sont isolées et multipliées en culture. Dans ce cas, les BPF tendent à préciser les paramètres de qualité pertinents qui doivent être satisfaits avant que de telles cellules soient utilisées pour traiter des patients.
Parmi ces paramètres figurent :
- L’absence de maladie infectieuse, de contamination microbienne et d’impuretés liées au procédé qui doit être démontrée.
- La mesure du contenu et la fonctionnalité des cellules du produit pendant sa durée de vie avant qu’il ne parvienne au patient.
- Chaque résultat est documenté et conservé de façon à assurer sa traçabilité, ce qui est important en cas de survenue d’évènements indésirables potentiellement imputables au produit.
Les détracteurs des BPF critiquent les coûts exorbitants de la mise en place et de la mise à jour des normes BPF.La mise en place d’un processus BPF conforme contribue de manière significative au coût global et allonge les délais de développement, notamment dans les phases précoces du développement, lorsque seuls quelques lots du médicament expérimental sont produits à des fins d’essai chez un petit nombre de patients. Pour les promoteurs - en particulier les universités, les petites et moyennes entreprises (PME) et les start-up - cela pourrait entraîner un risque financier voire même l’abandon du projet. Cela pourrait donc retarder ou même stopper le développement de nouvelles options thérapeutiques pour les patients. C’est pourquoi le degré de conformité aux BPF doit être ajusté avec soin, en tenant compte du stade de développement et du profil de risque, mais aussi de l’innovation thérapeutique, du bénéfice potentiel et du besoin médical.
Différents organismes de régulation du monde entier fournissent des directives BPF. Par exemple, en Europe, l’UE, en concertation avec les autorités compétentes des Etats Membres et l’Agence Européenne des Médicaments (EMA), met en place la législation et fournit les directives qui en résultent, tandis que la Food and Drug Administration (FDA) en a la responsabilité aux Etats Unis De nombreux autres pays utilisent les directives BPF fournies par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Toutes ces agences doivent veiller à ce que seuls des produits sûrs et efficaces soient fabriqués et mis sur le marché. Souvent, ce n’est pas un scénario noir ou blanc, car les autorités régulatrices ont à soupeser les risques par rapport aux bénéfices et améliorations possibles d’une thérapie ou d’un médicament spécifique pour la population ou un patient en particulier. Cela exige des preuves scientifiques solides sur la sécurité et l’efficacité des thérapies.
Les directives et réglementations BPF doivent être actualisées régulièrement pour s’adapter aux progrès scientifiques et techniques. Actualiser ou élaborer de nouvelles directives nécessite de consulter de nombreux acteurs différents, des industriels aux médecins, des chercheurs aux groupes de patients. Depuis 2005, la Commission Européenne a travaillé activement à l’actualisation de la partie de ses directives BPF relative aux médicaments biologiques. En 2015, elle a débuté une consultation ciblée d’acteurs sur les futures élaboration et adaptation des BPF pour les médicaments de thérapie innovantes. Les modifications envisagées tentent de définir les paramètres de mise au point de ces nouvelles thérapies innovantes.
La fiche d’information initiale avait été élaborée par Karen Duffy et revue par Giulo Cossu, Michele de Luca, ainsi que Judy Fletcher et Gordon McLean du MRC Centre for Regenerative Medicine. Elle a été mise à jour en 2016 par Ralf Sanzenbacher, et revue par Daniel Besser et Amanda Waite.
Les clichés d’installation GMP© REMEDI.
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